La gestion alternative

Responsable Georges Gallais-Hamonno LEO et G. Monarcha Orion Partners

Malgré la disparition d’un nombre important de fonds alternatifs en 2008 et 2009, les hedge funds font maintenant partie du paysage de la gestion collective de l’épargne.

On a constaté, dans les années qui ont précédé la crise financière, un accroissement notable et ininterrompu des investisseurs institutionnels (fonds de pension, mutual funds, banques, compagnies d’assurance, etc.) détenant des hedge funds dans leurs portefeuilles et l’apparition de particuliers moins aisés et vraisemblablement moins avertis que les premiers investisseurs, dans la clientèle des hedge funds. Aussi, alors qu’ils sont au cœur de la tourmente financière actuelle, la gestion alternative et le comportement des gérants de hedge funds suscitent des questions importantes.

Plusieurs travaux ont mis en évidence un phénomène de « manipulation » des valeurs liquidatives des hedge funds conduisant au « lissage » des rentabilités. Cela tient aux stratégies de fonds alternatifs qui détiennent des actifs peu liquides, ou dont le prix est difficile à déterminer (titres hors-cote, titres des sociétés en détresse, actions non cotées « private equities », immobilier, etc.). La tentation est donc grande pour des gérants peu scrupuleux de profiter de leurs actifs peu liquides et mal cotés pour manipuler le calcul de leurs valeurs liquidatives et donc celui de leurs rentabilités. Ce « lissage » est favorisé par l’absence d’environnement réglementaire, et sa conséquence statistiquement visible est l’existence d’une autocorrélation des rentabilités des hedge funds. Pouvoir mesurer l’ampleur de ce phénomène de lissage permettrait d’en examiner les conséquences sur le couple rentabilité-risque et d’étudier «l’effet de diversification» apporté par des hedge funds « délissés » dans un portefeuille de titres classiques.

Une question liée est celle du mimétisme entre fonds alternatifs : du fait de leur effet de levier potentiellement élevé, l’impact de leurs opérations sur les prix d’actifs pourrait être renforcé par un tel mimétisme. Toutefois, la mesure du mimétisme, qui pose déjà problème pour des portefeuilles traditionnels, soulève des questions supplémentaires dans le cas des fonds alternatifs du fait de leur utilisation de produits dérivés ou par le jeu des arbitrages complexes qu’ils mettent en place.

De surcroît, la nature non linéaire des risques des hedge funds en fait un objet d’étude particulier : l’utilisation de l’effet de levier, le recours aux produits dérivés impliquent une forte sensibilité aux mouvements de marchés. Comme cela a été largement illustré dans la période récente, une contraction de liquidité couplée à un effet de levier important peut obliger les hedge funds à liquider des positions dans des configurations les plus défavorables. Au-delà de la perte qui pourrait en résulter, c’est l’effet d’amplification potentiel de ces liquidations sur la crise d’illiquidité qui mérite d’être analysé.